Les comportements racistes s’affichent et s’affirment de plus en plus en Suède. Dernier épisode en date : une chaîne de grands magasins, Åhléns, tenue de retirer en catastrophe une publicité en relation avec la Sainte Lucie de son catalogue, de sa page Facebook et des panneaux publicitaires. Les communicants d’Åhléns avaient osé laisser publier la photo d’un jeune garçon de couleur posant en tenue de Lucia. C’était casser trop puissamment avec les traditions. Dans l’imaginaire suédois, Lucie, Lucia, est une jeune fille (blonde de préférence) et non pas un garçon (même blanc). Elle est vêtue d’une aube blanche, ceinte à la taille d’un ruban rouge et coiffée d’une couronne de bougies allumées sur la tête. Dans toutes les écoles et garderies du pays, et souvent même dans les entreprises on fête la Sankta Lucia. Au petit matin du 13 décembre, Lucia accompagnée de ses demoiselles d’honneurs et de garçons coiffés de chapeaux pointus ou déguisés en bonhommes de pain d’épice processionnent en entonnant des chants dédiés.

La Sainte Lucie dans sa forme scandinave est une fête païenne qui remonte au 18^e siècle. C’est la fête du retour de la lumière, le solstice d’hiver du calendrier Julien. À l’origine, au 3^e siècle, Lucia est une martyre sicilienne, de Syracuse qui sera sanctifiée.

La publicité d’Åhléns a réveillé les nationalistes suédois. Pour eux, pas question de toucher pas aux sacro-saintes valeurs suédo-suédoises de la Sankta Lucia ! Certains réseaux sociaux se sont immédiatement engouffrés dans la brèche qu’offrait pour eux cette opportunité d’exprimer leur haine de l’autre. Et de dénoncer le choix des publicitaires de mettre en exergue ce jeune garçon et de s’acharner sur sa couleur de peau et la symbolique que l’affiche drainait avec elle. La fachosphère pouvait se lâcher ! La violence des propos racistes fut telle que la famille du Lucia boy demandait à Åhléns d’interrompre la campagne. Ce que l’enseigne fit. Deux mondes s’affrontent. Les partisans du vivre ensemble et du multiculturalisme et les sectaires repliés sur leurs « valeurs » nationalistes. La Suède a rejoint le concert des nations contaminées par la droite extrême. Il y a dix ans les Démocrates de Suède (parti d’extrême droite, xénophobe et anti immigration) n’étaient pas représentés au Riksdag. Ils enregistrent aujourd’hui pratiquement 20 % des intentions de vote.

Et si on laissait Lucie faire ?