« Élections, piège à cons », braillait-on à tue-tête dans les années 1970 ! 2014, les politiques suédois ne le disent pas sur ce ton mais le pensent très fort, au point que le Premier ministre, Stefan Löfven, a fini par annoncer que son gouvernement renonçait à la tenue d’élections anticipées prévues pour mars 2015 après que l’opposition soutenue par les Démocrates de Suède (extrême-droite) ait rejeté leur proposition de budget, créant ainsi une crise politique indémêlable.
Ainsi, six des huit partis qui composent le Parlement ont trouvé un accord qui permet à un gouvernement minoritaire de gouverner (quelle que soit la formation politique, un gouvernement minoritaire pourra faire adopter son budget avec le soutien passif de l’opposition). Du grand maquignonnage qui révèle l’une des failles, et pas des moindres, du prétendu modèle, ou bien pragmatisme aigu qui ne dit pas son nom ? En réalité, il s’agissait avant tout de bâillonner l’extrême-droite, de l’empêcher d’avoir ce rôle d’arbitre qui bloquait toute vie parlementaire.
Les chefs de file des partis concernés nous l’ont joué au final « consensus oblige ». Ils auraient pu y penser plus tôt au lieu de faire croire à la plèbe que « la démocratie était en danger » et autres sornettes catastrophistes. Et si le coût de la tenue de nouvelles élections ne les avait tout simplement refroidis ? En tout état de cause, les tergiversations du Premier des ministres resteront un cas d’école dans les annales de la vie parlementaire suédoise. Le 2 décembre, il annonce que si son budget ne passe pas, il démissionnera. Le 3, il convoque des élections anticipées après que l’extrême droite se soit jointe à l’Alliance de centre-droit pour faire barrage à son budget. Le 27 du même mois, il annule les élections anticipées. Une vraie tambouille syndicaliste ! Sauf qu’il n’est plus le patron d’une centrale ouvrière. Le magouillage semble pourtant du même acabit, et les Suédois ne s’y sont pas trompés. Un sondage sur les agissements des partis impliqués dans l’accord indiquait que deux citoyens sur trois voyaient dans cette parodie une réelle entorse à tout principe démocratique. L’histoire ne s’arrêtera sans doute pas là !